Fondo Socioambiental Plurales: renforçant le pouvoir collectif

Connaissez-vous le travail du Fondo Socioambiental Plurales (Fond Socio-environnemental Plurales), notre organisation membre d’Argentine ? Nous avons interviewé Marta Esber et Verónica Luna, de l’équipe programmatique de l’organisation, qui ont partagé avec nous l’histoire de l’organisation, ses principaux domaines de travail et les stratégies qu’elle adoptent pour faire face aux défis qui se posent dans la lutte pour le droit à la terre et les territoires. Pour en savoir plus sur Plurales, rendez-vous sur leur site web.

Fondo Socioambiental Plurales

Pouvez-vous nous raconter brièvement l’histoire de l’organisation ?

Notre organisation est née en 2001. La crise sociale, politique et économique en Argentine nous a appelés à développer des projets, des actions, des réseaux et des alliances afin de défendre l’accès aux droits économiques, politiques, sociaux et environnementaux dans le pays et la région. En 2006, nous sommes devenus la Fundación Plurales.

Nous sommes basés à Córdoba, en Argentine, et nous apportons du soutien technico-politique, dans une perspective féministe, à des organisations féminines ou mixtes dirigées par des femmes, des paysans, des peuples autochtones et des secteurs périurbains dans différentes écorégions telles que le Chaco, la Puna et les zones humides, en Argentine et Amérique Latine. Nous avons des opérations au Mexique, au Honduras, au Guatemala, au Salvador, au Pérou, en Équateur, au Brésil, en Bolivie et au Paraguay.

En 2024, nous devenons Fondo Socioambiental Plurales. Cette décision s’inscrit encore une fois dans un contexte de crise alarmant qui nous a poussé à concevoir de nouvelles stratégies. Nous souhaitons soutenir et renforcer les organisations territoriales rurales et autochtones à travers des outils et des solutions concrètes pour promouvoir le pouvoir collectif aux territoires. Il s’agit d’organisations et/ou de groupes qui ne « rentrent » pas dans les profils de financement, parfois si restreints.

Pour cette raison, nous sommes désormais un fond socio-environnemental et faisons partie de la Alianza Socioambiental Fondos del Sur. L’Alliance rassemble des organisations de longue date telles que Fundo Casa Socioambiental au Brésil, Fondo Acción Solidaria au Mexique, Fundación Tierra Viva en Amérique centrale, Samdhana Institute en Asie du Sud-Est, Fundación Semilla en Bolivie, Fondo Socioambiental Perú, Emerger Fondo Socioambiental en Colombie, Réseau de Communautés Rurales en Argentine, Fondo Ñeque en Équateur et Fundo Tindzila au Mozambique.

Quelles sont les principaux axes de travail de l’organisation ?

Plurales est une entité juridique à but non lucratif dont la vision est de contribuer à la consolidation des « communautés démocratiques » en renforçant le respect de la diversité, l’équité et la solidarité, en intégrant la justice environnementale et de genre comme piliers socio-territoriaux. Des communautés où chaque être humain est un protagoniste libre et responsable, co-acteur des constructions collectives dans le cadre d’un développement humain durable.

En ce sens, notre organisation vise à façonner et à renforcer les temps, les espaces et les équipes de travail pour :

✔ Générer des conditions, des réflexions et des actions qui contribuent à promouvoir l’accès aux droits socio-environnementaux des personnes, de leurs organisations et des communautés.

✔ Promouvoir la justice de genre dans toutes ses dimensions et promouvoir l’équité dans la société à travers des projets et des stratégies d’intervention ou de communication.

✔ Accompagner les alternatives de transformation à travers les différentes dimensions de la culture et de l’éducation.

✔ Renforcer le public, en favorisant une compréhension critique, solidaire et globale des problèmes ;

✔ Promouvoir l’échange et la coopération entre les personnes, les communautés, les régions, les provinces, le pays et le monde, principalement dans les pays du Sud.

Pour atteindre ces objectifs, nos axes de travail actuels sont :

  • La promotion de la justice environnementale et de genre. Considérant que la justice environnementale ne peut être réalisée sans justice de genre, nous travaillons pour garantir le respect des droits des femmes, y compris leur accès et leur contrôle sur les biens naturels, en appliquant de manière transversale une approche féministe. Dans cette ligne de travail, nous agissons en collaboration avec l’École Féministe pour l’Action Climatique (EFAC) et la Plateforme Féministe Pour la Terre (FLP), en plus de promouvoir l’accès à des outils de plaidoyer aux communautés et aux organisations d’activistes et de défenseurs de l’environnement et du territoire et amplifier leurs voix pour la défense des territoires. Nous faisons ça à travers des projets tels que le documentaire Litio, le micro documentaire Guardianas del Territorio et les podcasts Después del Fuego et Hablemos del Campo, entre autres.
  • Le fond de soutien socio-environnemental pour l’allocation directe et flexible de fonds qui renforcent les capacités des organisations et des communautés à prendre des décisions autonomes et à mener des actions basées sur leurs pratiques et selon leur contexte spécifique. Cet objectif est atteint grâce à trois lignes de financement : le soutien aux militants et défenseurs de l’environnement dans leur travail de plaidoyer en faveur de la transformation ; promotion de solutions climatiques équitables avec une perspective de genre ; et des fonds urgents pour les militants.
  • La promotion du pouvoir collectif des communautés et des organisations d’activistes et de défenseurs de l’environnement et du territoire à travers le développement de meilleures capacités de plaidoyer à l’échelle nationale, régionale et mondiale. Pour cela, nous menons des actions en collaboration avec ENI Argentine, Tierra y ODS et la plateforme Defensoras Ambientales.

Quels sont les principaux défis auxquels Plurales est confrontée et comment vous résistez et s’organisez ?

Nous sommes confrontées à de multiples défis dans un scénario mondial de conflit entre les intérêts du modèle économique extractiviste et la lutte des peuples pour la conservation et la survie.

Partout dans le monde, les ressources naturelles sont concentrées sous le pouvoir de grands groupes économiques. En Argentine, comme ailleurs, nous nous trouvons confrontées à un environnement politique défavorable, caractérisé par un gouvernement et des politiques publiques d’extrême droite.

Les communautés locales, déjà marginalisées, sont confrontées à une grande vulnérabilité et à la criminalisation. En outre, les femmes occupent souvent une place subalterne dans la culture patriarcale, avec des difficultés à s’organiser et à participer pleinement à la vie publique.

Dans ce contexte, nous travaillons pour renforcer la résilience des communautés dans leur lutte pour la justice et la durabilité. Les principaux défis auxquels nous sommes confrontés actuellement sont d’élargir les stratégies de travail, en concentrant toutes nos actions sur l’accompagnement direct des communautés et des organisations locales dans leurs actions de défense et de protection des personnes et de l’écosystème où elles vivent.

Ainsi, nous résistons en promouvant le pouvoir collectif des communautés et des organisations de militants et défenseurs/défenseuses de l’environnement et du territoire à travers le développement de meilleures capacités de plaidoyer à l’échelle nationale, régionale et mondiale.

Nous avons plus de 20 ans de travail sur le territoire et nous savons qu’à de nombreuses situations, les interventions à travers le système de projets et de programmes ne suffisent pas pour répondre aux demandes et aux besoins de renforcement et d’impact des communautés et organisations locales, rurales et autochtones.

Les projets d’aide au développement et de coopération internationale imposent des exigences institutionnelles très rigides et étrangères aux réalités des organisations et collectivités de base. Cette situation est aggravée par les conditions contextuelles complexes des communautés : elles sont les premières à subir les catastrophes naturelles, l’impact de la crise climatique et la violation de leurs droits.

C’est pourquoi nous travaillons sur l’allocation directe et flexible de fonds qui renforcent les capacités des communautés locales à prendre des décisions de manière autonome et à mener des actions basées sur leurs pratiques et connaissances, adaptées à leurs contextes spécifiques.

À travers les lignes de travail mentionnées ci-dessus, nous cherchons à relever ces défis et à promouvoir la justice environnementale et de genre dans une approche féministe.

Comment la Plateforme Féministe pour la Terre contribue-t-elle au travail de Plurales ?

Il est très important pour Plurales d’appartenir à un réseau mondial, avec une perspective locale mais en même temps régionale, pour avoir un impact depuis les territoires, auprès des organisations et principalement auprès des femmes. Cela nous permet de travailler et de rendre visibles non seulement les problèmes mais aussi tout le potentiel qui s’entremêle avec d’autres organisations.

Le réseautage, la stratégie collective et l’échange avec d’autres pour le plaidoyer politique à différents niveaux sont des contributions importantes de la Plateforme à notre travail.

Être partie intégrante d’un espace politique nous permet de visualiser nos actions avec la perspective du Sud global, en partageant nos apprentissages et en apprenant avec nos collègues.

Avec les autres organisations qui composent la FLP, nous échangeons des stratégies, des actions, des agendas, des alliances et des expériences collectives dans une perspective féministe pour élargir les droits des femmes à la terre et aux territoires et garantir une durabilité environnementale et des conditions de vie adéquates.

Notre raison d’exister coïncide avec celle de la Plateforme, qui constitue un espace stratégique important pour construire des alliances et lutter contre les pratiques oppressives et les normes sociales, en faveur d’une société juste et égalitaire.

Le contexte social, politique et économique de nos territoires est alarmant et violent, mais nous avons une certitude : la réponse est toujours de s’engager dans un travail collectif, avec la ferme conviction que d’autres mondes sont possibles.

MUDECI: résistance aux effets du patriarcat au Mexique

Connaissez-vous le travail de MUDECI (Mujeres, Democracia y Ciudadanía A.C.), notre organisation membre du Mexique ? Nous avons interviewé sa coordinatrice générale, Elsa María Arroyo Hernández, qui a partagé avec nous l’histoire de l’organisation, ses principaux axes de travail et les stratégies qu’elle adopte pour faire face aux défis qui se posent dans la lutte pour la terre et les territoires. Pour en savoir plus sur MUDECI, rendez-vous sur leur site internet et lisez aussi notre article sur leurs bonnes pratiques de résilience.

Pouvez-vous nous raconter brièvement l’histoire de l’organisation ?

Notre organisation a été légalement créée en 2013 avec un groupe de camarades d’université et de militantes du Comité national indépendant pour la défense des personnes détenues, persécutées, disparues et exilées du Mexique. Dès que nous étions très jeunes, nous avons rejoint l’activisme civique au Mexique et avons soutenu certains des problèmes les plus difficiles ayant un impact sur la société.

Maintenant, nous le faisons sous la forme juridique d’une association civile, MUDECI (A.C. Femmes, Démocratie et Citoyenneté). Cependant, il est important de dire que notre travail en tant que militantes dure depuis plus de 37 ans.

Nous sommes une organisation de la société civile composée de femmes qui contribue à l’amélioration sociale du pays, en promouvant le respect des droits humains des femmes et des filles, ainsi que la construction de la citoyenneté pour renforcer la démocratie.

Quelles sont les principaux axes de travail de l’organisation ?

Les principaux axes de travail de l’organisation sont trois : la résilience climatique communautaire, l’autonomisation économique et la prévention de la violence contre les femmes et les filles.

Dans l’axe de la résilience climatique communautaire, nous promouvons les pratiques agroécologiques et les jardins urbains pour la sécurité alimentaire à travers le projet « Semeuses d’Espoir : jardins urbains pour la sécurité alimentaire et la résilience climatique communautaire », axé sur la connaissance des pratiques locales, la promotion de l’agriculture urbaine, la mise en œuvre d’une production alimentaire à petite échelle et la génération de résilience communautaire et climatique. En outre, il permet aux petits producteurs et à leurs communautés de devenir des agents clés du changement social. Nous préservons également la richesse alimentaire préhispanique à travers l’événement gastronomique et culturel Festival del Quelite. Par ailleurs, nous dénonçons la captation politique de l’eau et son impact sur la vie des femmes. C’est pour ça qu’on dit habituellement que « l’eau a un visage de femme. »

Dans le cadre du deuxième domaine de travail, nous développons plusieurs actions visant à prévenir la violence à l’égard des femmes et des filles. Nous effectuons des circuits urbains pour détecter les zones dangereuses pour les femmes et les filles et nous disposons d’un programme de formation, d’accompagnement et d’intervention territoriale pour fournir des premiers soins juridiques et psychologiques aux victimes de violence dans la municipalité d’Ecatepec. Dans ce programme, qui s’appelle Brigadas Violetas, nous avons réalisé un diagnostic communautaire dans quatre quartiers en utilisant la méthodologie de l’Organisation des Nations Unies sur les villes sûres et nous avons gagné le prix Voces Vitales Contra la Violencia. Ces quartiers présentent un degré élevé de marginalisation sociale et violence communautaire et manquent de services de base. Le projet vise à générer des réseaux de soutien au sein des communautés, aidant les femmes victimes de violence.

En matière d’autonomisation économique, nous travaillons avec des femmes survivantes de violences et les formons au travail grâce à notre projet économique Lonchito, qui fournit des services de restauration aux entreprises et aux organisations de la société civile. Les produits sont fabriqués par des femmes qui participent à nos ateliers de formation professionnelle, ce qui leur permet d’avoir un revenu, renforçant leur autonomie économique. Cela contribue à l’éradication de la violence contre les femmes et les filles, en favorisant leur autonomie pour briser la transmission intergénérationnelle de la pauvreté des femmes.

Quels sont les principaux défis auxquels MUDECI est confrontée et comment vous résistez et s’organisez ?

Un grand défi auquel nous sommes confrontés en tant qu’organisation est que ces dernières années au Mexique il n’y a aucun soutien financier pour les organisations de la société civile. En outre, les organisations de base ne sont pas considérées éligibles pour recevoir des financements et mettre en œuvre des projets de coopération technique. Normalement on pense que les organisations communautaires de base sont des projets et pas des agents de changement.

Dans ce scénario, nous avons toujours travaillé davantage sur la durabilité de l’organisation au lieu de dépendre du financement d’une entité, et c’est pourquoi nous avons notre projet économique Lonchito. En plus de responsabiliser les femmes, les bénéfices de ce projet sont également destinés aux différents programmes de notre structure, contribuant ainsi à la pérennité de notre organisation.

Le fait d’avoir le projet Lonchito comme part de notre durabilité économique depuis plus de 11 ans nous a permis d’être indépendantes quant aux projets que nous mettons en œuvre et à nos positions politiques, puisque nous n’avons pas besoin de financement gouvernemental pour nos activités.

Un autre défi est la marchandisation des systèmes alimentaires, qui, avec d’autres facteurs, conduit à l’insécurité alimentaire dans de nombreuses communautés. C’est pourquoi le projet Semeuses d’Espoir, qui consiste à aménager et entretenir des jardins urbains, et aussi une forme de résistance.

Avec ce projet, nous promouvons le renforcement des communautés, l’amélioration du paysage, l’habitabilité urbaine, l’accès au loisir, l’éducation environnementale, l’utilisation de l’eau de pluie et l’appropriation des espaces publics, en plus de renforcer la compréhension que le droit à la terre est essentiel pour préserver les divers systèmes alimentaires locaux.

Comment la Plateforme Féministe pour la Terre contribue-t-elle au travail de MUDECI ?

L’incorporation à la Plateforme Féministe pour la Terre (FLP) est très importante pour MUDECI car elle nous donne de la visibilité internationale et a aussi un impact sur le travail local et national que notre organisation mène au Mexique. Depuis notre incorporation, nous avons été invitées à des événements, des collègues et organisations nous demandent notre avis sur des questions qui les concernent, et si nous postulons aux conseils techniques des agences gouvernementales nous avons de meilleures chances d’être acceptées.

Peu d’organisations de base comme la nôtre ont la possibilité d’appartenir à un réseau international tel que la Plateforme, ce qui nous permet de rendre visible notre travail et nous donne aussi une renommée.

De même, grâce à la FLP on peut connaître la trajectoire des autres membres. Nous avons eu de nombreux échanges d’expériences, mais aussi des conseils techniques en découvrant le travail des collègues. Ce processus nous permet d’avoir désormais une vision plus globale du travail que nous accomplissons.

Grâce à la FLP, nous avons également réussi à participer à des événements internationaux. Au-delà de contribuer à notre formation, cela nous permet de connaître les expériences professionnelles d’autres pays. Nous avons l’opportunité de revoir les projets que nous mettons en œuvre au niveau local dans nos communautés pour les renforcer, les élargir et corriger ce qui n’est pas fait de la meilleure façon.

En plus, le soutien financier que nous apporte la FLP a servi à consolider nos pratiques mais aussi à les systématiser par écrite, en vidéo, etc. Ce qui a également été très important car cela nous a permis d’avancer et de rendre visibles les projets que nous avons au Mexique, comme Semeuses d’Espoir. Avec ce soutien, le projet a élargi son champ d’action et nous a permis d’impliquer plus d’actions.

Jusqu’à présent, plus de 100 filles et garçons, 120 femmes et 12 hommes ont été formés aux pratiques agroécologiques et à l’élevage de lapins et de poulets fermiers et nous avons doublé l’objectif de servir 1 500 repas à faible coût dans notre cuisine communautaire. Le projet a été sélectionné par le International Institute for Environment and Development (IIED) comme étude de cas.

Luna Creciente : les féminismes en Équateur du local à l’international

Connaissez-vous le travail du Mouvement des femmes des secteurs populaires Luna Creciente, notre organisation membre en Équateur ? Nous avons interviewé Clara Merino, directrice exécutive de l’organisation, qui a partagé l’histoire de Luna Creciente, ses principaux domaines de travail et les stratégies qu’elles adoptent pour faire face aux défis. Pour plus d’informations, lisez notre article sur les meilleures pratiques de résilience de Luna Creciente.

Pouvez-vous nous raconter brièvement l’histoire de l’organisation ?

En 2000, une réunion des organisations de femmes des secteurs pauvres a été organisée à Quito. D’autres réunions, rencontres locales et nationales, échanges et visites de territoires se poursuivent, jusqu’à ce qu’en 2004, avec le soutien de la Fondation des Femmes Luna Creciente, naisse le Mouvement des Femmes de Secteurs Populaires du même nom. Le mouvement est constitué de groupes avec différents types de visions, d’actions, d’incidences et de composition.

Au cours d’un processus de 20 ans, avec le départ de certaines participantes et l’entrée d’autres, le Mouvement National s’est consolidé, avec une direction collective, dans 6 provinces de l’Équateur : Pichicha, Cotopaxi, Loja, Esmeraldas, Sucumbíos et Morona Santiago. Nous regroupons 6 organismes du deuxième degré qui composent 322 organisations locales. Ses membres sont issus d’une diversité de peuples/nationalités, origines géographiques (côte, montagnes, Amazonie) ; formes de vie ; nombre de participants ; âge ; sexe/genre et incidence politique.

Cela a été possible grâce à un processus permanent d’action-réflexion-action soutenu aux niveaux local, régional et national et à la participation dans des espaces régionaux et internationaux plus larges.

Quelles sont les principaux axes de travail de l’organisation ?

Prenant en compte les luttes historiques et actuelles des organisations de femmes dans leurs diversités, les principales lignes d’action sont le produit de rencontres, d’analyses et de définitions collectives en assemblées, échanges et décisions des diversités locales qui cocréent des positions et des actions à partir de leurs réalités locales aux niveaux national et mondial.

Bien que les actions soient diverses selon les réalités spécifiques des organisations, les principales sont :

  • Renforcement organisationnel et formation politique féministe dans les espaces nationaux et locaux pour développer des pratiques et des actions qui conduisent au renforcement des organisations cherchant le développement d’une pensée critique avec des éléments conceptuels, méthodologiques et politiques à partir de leurs propres expériences et sagesses.
  • Renforcement des droits personnels et collectifs, avec un accent sur les droits des femmes, des peuples/nationalités, la santé globale et de la défense des corps, des terres et des territoires, avec des éléments clés d’action-réflexion-action applicables à tous les niveaux.
  • Défense des droits humains, fondamentalement des femmes et des filles, en mettant l’accent sur les droits économiques, sociaux, culturels et politiques.
  • Communication alternative et recherche participative, avec intégration de connaissances propres, historiques et actuelles, pour la formulation et l’expression de concepts, de codes et de ses propres formes de communication, diffusion et analyse.
  • Actions conjointes avec les organisations et mouvements autochtones, noirs et populaires qui accueillent les propositions des femmes féministes organisées dans les territoires.
  • Travail conjoint avec des coalitions et plateformes féministes qui œuvrent pour la justice de genre et la justice climatique.

Quels sont les principaux défis auxquels Luna Creciente est confrontée et comment vous résistez et s’organisez ?

Nos principaux axes d’action répondent aux défis posés. Parmi eux, nous soulignons que l’appauvrissement croissant de la population, plus grave chez les femmes, les jeunes, les filles et les garçons, dû à la mise en œuvre du « nécrolibéralisme », se réalise au niveau national et mondial, avec quelques exceptions dans les pays qui résistent.

En conséquence, il y a des inégalités croissantes en matière de conditions de vie décentes, de graves violations des droits de l’homme et des femmes et une destruction de la nature avec l’avancée brutale de l’extractivisme, en particulier minier, pétrolier et agro-industriel, avec la destruction de l’habitat des communautés.

Cette réalité conduit à des situations extrêmes, telles que : i) une migration croissante dans des conditions inhumaines et dangereuses qui font aussi que la petite production agricole soit laissée aux mains de femmes âgées ; ii) l’augmentation de la violence et la déclaration d’un « état de guerre interne » avec persécutions et attaques contre les mouvements sociaux et les défenseures et défenseurs de la nature ; iii) le manque de ressources économiques et de subsistance pour les femmes pauvres, leurs organisations et le Mouvement, iv) les difficultés de connexion et de communication, aggravées par les coupures d’électricité.

Face à de sérieux défis, le Mouvement résiste et agit sur plusieurs fronts de résistance, notamment :

Nous activons l’action communautaire des membres des organisations et de leurs alentours, avec des contributions surtout du travail communautaire non rémunéré et en très peu d’occasions avec de petits fonds, de plus en plus rares et décroissants, et des contributions minimes de la coopération internationale.

Nous travaillons à la poursuite permanente de la formation politique féministe et aux actions conjointes avec d’autres organisations féminines et sociales.

Nous agissons avec des espaces possibles et dans des conditions précaires de communication face à face et virtuelle lorsque cela est possible entre les femmes de chaque communauté/organisation, entre elles au niveau régional et entre les membres du Mouvement.

Nous construisons la permanence des rencontres et assemblées régionales et nationales, en personne aux occasions possibles (ce qui arrive de moins en moins, faute de financement) et virtuelles selon les possibilités de connexion.

Nous persistons avec la permanence des Écoles de Formation Politique Féministe ; participation à des événements nationaux et régionaux d’espaces féministes et de défense de la nature ; contributions et soutien aux propositions politiques en faveur de la justice sociale, politique, de genre et climatique.

Nous nous concentrons sur l’unité dans la diversité au-delà des élections et de l’incidence sur d’autres mouvements sociaux et féministes.

Comment la Plateforme Féministe pour la Terre contribue-t-elle au travail de Luna Creciente ?

Faire partie de la FLP a permis à Luna Creciente Equateur de s’enrichir en participant aux analyses politiques et des réalités des femmes pauvres organisées dans les pays du Sud, à partir de leurs courageuses luttes organisationnelles et de leurs stratégies.

Cela s’est concrétisé par le sentiment de faire partie des rêves et des luttes courageuses d’autres organisations de femmes sur leurs territoires et des propositions communes développées dans divers espaces mondiaux et régionaux, parmi lesquels nous soulignons la réunion régionale de la FLP en Amérique Latine et la présence dans la puissante Marche des Marguerites, au Brésil, en 2023.

Nous soulignons également que la connaissance des luttes des organisations de femmes en Amérique Latine, en Afrique et en Asie a enrichi notre compréhension des différentes réalités, ainsi qu’une compréhension plus large de la réalité internationale et une vision plus globale des défis de nos féminismes.

Les espaces obtenus grâce à l’adhésion à la FLP ont été essentiels à notre travail pratique de défense de nos droits personnels et collectifs, ainsi qu’à l’expansion et à la mise en œuvre de propositions ayant un impact sur les politiques publiques locales, nationales et mondiales.

Comme partie de la FLP, nous avons aussi la possibilité de participer à des importants espaces d’interaction à différents niveaux, qui nous donnent l’opportunité de partager des expériences, idées, connaissances et rêves pour des meilleures vies pour nous et nos communautés, pendant on partage et enrichisse aussi nos collègues d’après les expériences directes des organisations d’Équateur.

De plus, la FLP nous a offert un bon soutien avec de petits fonds en 2022 et 2023 pour poursuivre, avec des limitations dues à notre financement limité, les écoles de formation politique nationales et locales du Mouvement des Femmes des Secteurs Populaires, notamment sur les questions essentielles de justice de genre et de justice climatique, des axes importants de notre travail.

Azul: plaidoyer pour le peuple Amazigh dans le monde entier

Connaissez-vous le travail d’Azul, notre organisation membre du Maroc ? Nous avons interviewé l’une de leurs membres fondatrices, Amina Amharech, qui a partagé avec nous l’histoire de l’organisation, ses principaux axes de travail et les stratégies qu’elle adopte pour faire face aux défis qui se posent dans la lutte pour la terre et les territoires. Pour en savoir plus sur Azul, lisez aussi notre article sur leurs bonnes pratiques de résilience.

Pouvez-vous nous raconter brièvement l’histoire de l’organisation ?

En 2012, nous étions, avec un groupe d’amis, membres d’un groupe sur Facebook dédié à la poésie Amazigh, qui est un élément incontournable de notre culture ancestrale. La poésie est pour nous le moyen de nous exprimer et de décrire notre vie, nos conditions socio-économiques, notre vision du monde. Malheureusement, chaque fois qu’on essayait de discuter une thématique et d’analyser les textes, l’administrateur du groupe disait : « Non, non, ne dites pas ça, c’est politique ».

Il y avait beaucoup de censure, alors que le 2013 nous avons décidé de quitter ce groupe et de créer un groupe dans lequel chaque Amazigh pourrait venir, partager, discuter, dire ce qu’il pense de la situation actuelle, raconter son histoire, celle de sa communauté, celle de sa famille, raconter des histoires aussi sur les tribus.

À partir de ce moment, nous avons commencé vraiment à analyser la situation, les conditions, les faits historiques, les phénomènes socio-économiques mais aussi de parler de pourquoi est-ce que nous, Amazigh, on se sentait mal dans notre peau, pourquoi est-ce qu’il y avait autant de discrimination, pourquoi est-ce qu’il y avait autant de pauvreté et d’exclusion socio-économique envers les Amazigh enclavés dans les montagnes et les campagnes.

Nous avons également parlé de la colonisation, de ce que le protectorat sur le Maroc a apporté en matière d’organisation administrative et le changement des lois, en faisant abstraction des lois Amazigh et comment on a été dépossédés petit à petit par des lois estrangères.

Nous avons soulevé la question de notre responsabilité, c’est-à-dire comment nous, Amazigh, devions réagir et qu’est-ce que nous pouvions faire contre cette exclusion et cette discrimination. On a fait, dans le groupe, des campagnes de solidarité avec des communautés en détresse et de résistance des savoir-faire ancestraux, parmi d’autres actions où chacun aidait comme pouvait.

En 2016, je suis partie à Genève assister aux Mécanismes d’Expert sur les Droits des Peuples Autochtones MEDPA / EMRIP et j’ai fait des déclarations sur la situation des Amazigh du Maroc telle que nous la concevons dans le groupe de manière collégiale.

 On était arrivés à une conclusion : Les lois nationales ne pouvaient pas nous protéger, nous Amazigh, et donc il fallait chercher un autre moyen. Et on a choisi celui des Nations Unies et du plaidoyer à l’échelle international.

Nous avons alors commencé à fonctionner comme un réseau Amazigh à partir du groupe Facebook où y il avait des personnes ayant des cadres associatifs avec qui nous organisions des conférences, rencontres et opérations en partenariat ; mais également des militants de terrain sans cadre institutionnel désireux de défendre leur identité et leurs droits comme ils le peuvent.

Quelles sont les principaux axes de travail de l’organisation ?

Les principaux axes de travail de Azul découlent du travail de réflexion qui a été fait par le groupe et des priorités qui en sont émergées.

Il y a des axes principaux comme le droit d’accès à la terre et aux ressources naturelles, qui sont des éléments essentiels pour les Amazighs en tant que peuples autochtones. Mais il y a des axes annexes tout aussi importants, tel que la discrimination linguistique, la marginalisation socio-économique, l’accès à la santé, à l’enseignement, le refus des prénoms Amazighs, l’enclavement, autant de conséquences de lois nationales d’inspiration colonialiste et néocolonialiste.

Les problématiques auxquelles nous faisons face sont cumulatives et imbriquées. Un Amazigh à qui on a pris sa terre est un Amazigh déraciné et une victime vulnérable de l’assimilation forcée.

Bien sûr, chaque fois que nous parlons des droits des Amazigh nous parlons des femmes, qui sont au centre de nos droits collectifs, et des jeunes, qui sont notre future. Le fait est que les femmes sont les plus impactées par les retombés des politiques passées et présentes et des discriminations institutionnels, religieuses et socio-économiques.

Notre réseau couvre pratiquement toute la région du Maroc, mais parmi nous, nous avons également des amis amazighs de Tunisie, d’Algérie, de Libye et de la diaspora ainsi que des amis étrangers sympathisants.

Une chose très importante à prendre en considération c’est de rester à l’écouter des communautés et faire en sorte que personne ne se sente seul et isolé. Le colonialisme a toujours été bâti sur le principe du « diviser pour mieux régner » et nous devons rester unis et solidaire entre nous et fédérer autour de notre cause.  

Lorsque les communautés sont isolées et qu’il n’y a pas d’informations qui circulent, ils peuvent être dépossédés en un temps record. Notre rôle dans Azul est de rester informé par les membres du réseau et de traiter les informations reçus avant de les publier pour mobiliser l’opinion publique ou de les utiliser pour les besoins du plaidoyer.

En plus des réseaux sociaux qui nous permettent de communiquer et de rester informé, Il faut parfois se déplacer et aller sur le terrain, prendre la route, aller voir les communautés… Tout en restant vigilant et en préservant notre sécurité, et ça c’est une responsabilité énorme.

Quels sont les principaux défis auxquels Azul est confrontée et comment vous résistez et s’organisez ?

Comme pour tous les autochtones du monde, les défis de AZUL et des Amazigh sont multiples. Tout simplement parce que quand on parle de la terre, on parle de l’autonomisation, des droits socio-économiques, de la préservation des savoirs, des savoir-faire, des ODDs (Objectifs de Développement Durable), des changements climatiques, des écosystèmes, de la biodiversité, des déplacements forcés et de l’immigration.

Pour comprendre les défis, il faut avoir une vision globale et multidimensionnelle. Lorsqu’on parle du droit à la terre et des territoires que nous perdons, cela implique inexorablement la perte des modes de vie, de la culture, de la langue et au-delà, la perte de l’identité.

Sans le droit de gouvernance de nos ressources naturelles, nous ne pouvons être économiquement autonomes et ne pouvons assurer la pérennité de ces ressources menacées de disparaître.

Nous sommes confrontés au changement climatique, aux conséquences des activités extractives et aux politiques agricoles publiques hydrophages et surtout aux lois colonialistes qui nous dépossèdent depuis plus d’un siècle, et provoquent dégâts sur le fonctionnement de la société Amazigh qui est traditionnellement matriarcale.

Il y a beaucoup des choses en train de se perdre dans nos traditions, comme les savoir-faire, les systèmes de gouvernance et de gestion chez les Amazighs. Et parmi les formes de résistance pour faire face à ça, on considère fondamentale pratiquer la solidarité, qui est un de nos valeurs.

À travers du groupe d’Azul, nous avons organisé des opérations et des campagnes de solidarité pour soutenir des communautés en détresse mais aussi pour faire revivre des savoir-faire ancestraux relatifs au travail de la laine, relancer la « Tiwiza » / travail communautaire dans les champs en aidant des petits agriculteurs à préserver les semences endémiques et à éviter les graines OGM.

Autre défi de taille c’est la sécurité des communautés et la défense des défenseurs, car depuis la pandémie nous assistons à une régression des droits de l’Homme qui pèse de tout son poids sur nos conditions au quotidien.

Tous ces défis ne nous découragent pas. Ils nous permettent d’avoir encore plus de force pour continuer à lutter pour nos droits et ne pas laisser les mêmes traumatismes qu’on a vécu en héritage à nos enfants. Cet espoir, d’une vie meilleure pour les générations futures, c’est ce qui nous fait vivre et c’est notre moteur.

Grâce aux plaidoyers, mais aussi grâce aux valeurs que Azul et tous ses membres (les azuliens) véhiculent, aujourd’hui nous avons beaucoup d’amis du monde entier qui sont solidaires avec nous, apprécient ce que nous faisons, nous soutiennent et respectent notre combat.

Cette solidarité nous fait du bien aussi et c’est très important à nos yeux. Nous sommes un peuple pacifiste et nous sommes solidaires avec tous les peuples de la Terre qui vivent les mêmes choses que nous. Nos conditions nous rapprochent des autres autochtones du monde que nous côtoyons pour le plaidoyer au niveau global et cela malgré la différence de langues, de régions, de religions, de couleurs, de pays etc., nos problématiques en tant que autochtones sont similaires.

Le dernier défi est relié au contexte post pandémie du Covid : c’est la régression des droits humains en général et des peuples autochtones mais également de tous les droits de l’Homme et des communautés. Une crise combinée avec la crise économique des foyers. Cela pousse inexorablement beaucoup de personnes à se faire de plus en plus discrets et essayent de ne pas se faire remarquer. Les gens ont peur pour leur sécurité et ça nous le comprenons très bien.

Pour faire face à tous ces défis, nous travaillons beaucoup sur le réseautage. Aujourd’hui, nous avons un très bon réseau à l’international, et de bonnes relations avec d’autres organisations. Nous mettons notre savoir et notre expertise aussi à la portée des autres organisations, mais aussi des chercheurs universitaires qui se penchent sur des sujets qui nous concernent.

Par exemple, nous travaillons en partenariat avec la plateforme Traab, menée par Soraya El Kahlaoui, docteur en sociologie, qui fait un travail considérable sur les problématiques de la Terre. Dans ce projet, qui consiste dans une application pour la cartographie des cas de spoliation, on collecte des informations sur les conflits fonciers pour identifier les communautés touchées, dresser une cartographie complète du problème et faire entendre la voix des communautés dépossédées. Comme ça, nous abordons le problème du manque de données sur le sujet et permettons notamment aux femmes de faire entendre leurs revendications.

Nous contribuons par ailleurs à des communications aux rapporteurs spéciaux, des rapports nationaux et internationaux tel que l’Examen Périodique Universel / UPR, avec des contributions sur les droits des amazighs.

Les écrits sont une excellente alternative au manque de moyens financiers et nous permettent de rester connectés, actifs et pro actifs en évitant les dépenses et la mise en danger des défenseurs. N’oublions pas que notre sœur Kamira Nait Sid est toujours en prison en Algérie pour avoir défendu la cause Amazigh.

Pour éviter ce genre d’incrimination abusive, nous nous référons à la Déclaration des Nations Unies sur des Droits des Peuples Autochtones, parce que, à ce jour, c’est le seul texte juridique global qui défend nos droits tout comme la Convention 169 de l’OIT et la résolution 39 de la CEDAW pour les femmes et jeunes filles Autochtones.

Comment la Plateforme Féministe pour la Terre contribue-t-elle au travail d’Azul?

Bien sûr, de même qu’il y a des défis, il y a toujours des opportunités et notre opportunité c’est de faire aujourd’hui partie de réseaux et de plateformes internationales qui nous donnent de la visibilité et nous permettent de rencontrer d’autres organisations qui vivent les mêmes problématiques et avec qui nous échangeons les expertises, expériences et bonnes pratiques.

Azul a rejoint son premier réseau international, l’ILC, en 2018 et en devenant membre du conseil global, j’ai rencontré Patricia Chaves, de Espaço Feminista (Brésil). Cela nous a permis d’échanger autour de la question du genre et des droits fonciers des femmes.

Nous avons mûrement réfléchi depuis notre perspective de femmes, qui travaillons avec les communautés et qui connaissons cette réalité au quotidien, et à la manière d’apporter des solutions concrètes pour celles qui vivent les mêmes choses que nous.

C’est comme ça que la Feminist Land Platform (Plateforme Féministe pour la Terre) est née pour devenir un espace qui respecte cette approche de bas vers le haut (bottom up), qui est rarement respectée à travers le monde. Généralement les décisions ne sont pas prises par les communautés mais qu’elles sont dictées par des organisations très grandes ou bien à une échelle globale, ce qui fausse la logique et nous voulions que ça change.

Aujourd’hui la FLP c’est une concrétisation de cette nouvelle façon de voir le problème des femmes dans le cadre de la justice du genre et du droit à la terre pour améliorer les conditions socio-économiques des femmes : c’est une revendication politique, pour, par et avec les femmes.

La Feminist Land Platform nous a apporté aussi un espace pour valoriser notre expertise. Azul est plus axé sur le plaidoyer international du fait que les lois nationales ne nous protègent pas pratiquement. Nous avons acquis et développé depuis 2016 un ensemble de mécanismes, de savoir en matière de la loi, des lois internationales, les moyens de protection et de défense des droits à la terre, territoire et ressources naturelles des peuples et femmes autochtones dans un contexte d’immigration et de changements climatiques.

Nous mettons cette expertise à la portée et au service de nos sœurs dans la Feminist Land Platform, mais en même temps, nous apprenons beaucoup de nos sœurs parce que chaque organisation a un domaine d ‘expertise. Notre richesse vient de nos diversités pleines de similitudes qui ont aussi des peuples autochtones.

AZUL est tous ces membres sommes fiers d’être un membre fondateur de la FLP, de partager sa vision et d’œuvrer pour ses objectifs de justice et d’équité dans les droits en général et les droits fonciers en particulier. La terre et la femme sont importantes dans la culture Amazigh, d’ailleurs le même mot, Tamazighte, signifie la terre, la langue et la femme. Cela prouve que nous avons dans notre culture tout l’esprit de la Feminist Land Platform et ça c’est juste extraordinaire pour nous !

Les meilleures pratiques de résilience de Ubinig (Bangladesh)

« Pratiques agroécologiques Nayakrishi et préservation des richesses semencières » est une pratique inspirante développée au Bangladesh par UBINIG (Policy Research for Development Alternative), l’une des membres de la Plateforme Féministe pour la Terre (FLP).

UBINIG dirige le Nayakrishi Andolon, un nouveau mouvement agricole qui pratique une agriculture basée sur la biodiversité et qui réunit plus de 300 000 familles d’agriculteurs et agricultrices dans tout le Bangladesh.

L’organisation travaille au niveau local, résolvant les défis liés aux moyens de subsistance et à l’existence des communautés dans une économie de plus en plus mondialisée et intensément compétitive, et aussi au niveau politique, en plaidant pour de meilleures solutions aux défis qui affectent la vie de la majorité, en particulier des personnes marginalisées.

La FLP a récemment cartographié certaines des meilleures pratiques de résilience de nos membres afin que d’autres communautés et organisations puissent apprendre et adapter des outils et des stratégies à leurs réalités locales. Dans cet article, nous parlerons d’une des pratiques inspirantes développées au Mexique par MUDECI.

Ceci fait partie d’une série d’articles détaillant les meilleures pratiques de chaque organisation qui compose la FLP. Consultez notre blog pour lire les autres !

Pratiques agroécologiques Nayakrishi et préservation de la richesse semencière

Cet article est basé sur des pratiques mises en œuvre dans cinq districts du Bangladesh : Tangail (zone de plaine inondable), Pabna, Natore et Kushtia (zones sujettes à la sécheresse) et Cox’sbazar (zone côtière). Le projet bénéficie à plus de 80 000 agriculteurs, parmi lesquels 47 000 femmes.

Nayakrishi Andolon est un mouvement paysan fondé sur la biodiversité, créé en 1992 et dirigé par des femmes. Leur pratique suit 10 principes, dont l’interdiction d’utiliser des pesticides, des engrais chimiques ou l’extraction des eaux souterraines. Ils plaident pour l’utilisation de semences de variétés locales et pour la collecte, la régénération et l’échange de semences entre agriculteurs.

Jusqu’à présent, le mouvement a collecté plus de 2 700 variétés de riz et 1 000 variétés d’autres cultures, notamment des légumes, de l’huile, des épices, des fruits, etc. Il conserve également des semences pour les crises liées au changement climatique telles que les inondations, les sécheresses et les cyclones.

Les semences sont conservées au Community Seed Wealth Centre (CSW), créé en 1998 en tant que système institutionnel pour le Nayakrishi Seed Network (NSN). « Les principaux CSW sont situés dans les centres de UBINIG à Tangail et Pabna. Des cabanes à semences au niveau des villages font également partie du CSW. Les agricultrices et agriculteurs déposent et récupèrent les semences auprès des CSW », explique Farida Akhter, directrice exécutive de l’UBINIG.

Les communautés concernées sont pour la plupart composées de petits agriculteurs et agricultrices possédant chacun moins d’un hectare de terre. Grâce à cette pratique, ils reçoivent régulièrement des formations sur la conservation des semences et les méthodes agroécologiques.

Ceux qui ne possèdent pas de terre élèvent des chèvres et des vaches et travaillent avec les agricultrices et agriculteurs. Ils partagent la bouse de vache et le lait avec les familles propriétaires et reçoivent en échange de la paille et d’autres fourrages.

Grâce à ce projet, les terres communes sont préservées et exemptes de produits chimiques nocifs, donc les femmes pauvres et sans terre peuvent avoir accès aux plantes comestibles et au pâturage du bétail.

Les relations communautaires reposent également sur l’échange et le partage de semences, ce qui contribue à accroître la diversité des cultures. En cas de catastrophe naturelle, les agriculteurs et agricultrices partagent les semences avec ceux qui ont perdu leurs récoltes et leurs semences.

Pour le développement de cette pratique, UBINIG s’associe au Department of Agricultural Extension, aux banques de gènes du gouvernement du Bangladesh et aux groupes de femmes des 64 districts du pays qui composent le Réseau Femmes et Biodiversité (Women and Biodiversity Network). Ces groupes travaillent avec les agricultrices et agriculteurs dans leurs régions respectives et prennent les semences dont ils ont besoin auprès des CSW.

Principaux résultats et défis

Les agricultrices et agriculteurs ont commencé avec moins d’un hectare, mais beaucoup d’entre eux ont pu agrandir leurs terres au fil des années. Il a également été constaté que les femmes ressentaient le besoin d’acheter des terres en leur nom avec les économies réalisées grâce à l’élevage de vaches et de chèvres.

Un résultat important de ces pratiques agricoles a été que de nombreux femmes qui dirigent des ménages (divorcées et jeunes veuves) ont pu acheter ou louer des terres pour les cultiver et devenir autosuffisants en nourriture, puisque les méthodes agroécologiques ne nécessitent pas d’argent pour acheter des produits chimiques tels que engrais et pesticides.

« De plus en plus de personnes rejoignent ce mouvement et les agricultrices organisent des réunions sur les semences et échangent leurs connaissances avec différents groupes. En février 2024, elles ont accueilli des agriculteurs et agricultrices du Sri Lanka et du Myanmar », ajoute Akhter.

Elle souligne également que les agricultrices Nayakrishi sont devenues plus conscientes de leurs droits fonciers et en discutent plus souvent. « Elles parlent aussi des rivières, qui permettent de cultiver des variétés locales particulières. Mais avec la pollution des rivières, ces possibilités disparaissent », prévient-elle.

Cette pratique est liée à un mouvement plus large en faveur de la souveraineté alimentaire et semencière, et Akhter souligne qu’ils sont confrontés à de nombreux défis en raison de l’utilisation des semences de laboratoire par des entreprises, y compris les OGM, et du fait qu’il n’y a aucun soutien gouvernemental pour les petits agriculteurs et agricultrices.

« La loi sur les semences du pays est conçue pour les sociétés de sélection de semences ; ainsi, les droits des agriculteurs et agricultrices sont violés. Le mouvement est donc significatif pour les communautés », conclut Akhter.

Les meilleures pratiques de résilience de MUDECI (Mexique)

« Semeurs d’espoir : jardins urbains pour la sécurité alimentaire et la résilience communautaire » est l’une des meilleures pratiques de résilience développées par l’organisation Mujeres, Democracia y Ciudadanía A.C. (MUDECI), l’une des membres de la Plateforme Féministe pour la Terre (FLP).

MUDECI est une association à but non lucratif créée en 2013 au Mexique par des femmes de base possédant une vaste expérience du travail territorial et de l’activisme. Sa mission est d’assurer la reconnaissance publique du leadership des groupes de femmes organisés sur le territoire en tant qu’agents de changement et de positionner leurs organisations locales dirigées par des femmes comme forces motrices dans l’établissement de l’agenda public et la responsabilité politique.

La FLP a récemment cartographié certaines des meilleures pratiques de résilience de nos membres afin que d’autres communautés et organisations puissent apprendre et adapter des outils et des stratégies à leurs réalités locales. Dans cet article, nous parlerons d’une des pratiques inspirantes développées au Mexique par MUDECI.

Ceci fait partie d’une série d’articles détaillant les meilleures pratiques de chaque organisation qui compose la FLP. Consultez notre blog pour lire les autres !

Centre de formation en agriculture urbaine

Ecatepec, située à la périphérie de Mexico, est une municipalité essentiellement urbaine modifiée par la migration interne au pays. Dans les années 60 et 70, elle était fortement occupée par des personnes venant des communautés rurales en quête de meilleures conditions de vie. Étant donné que ses premiers habitants se consacraient à la culture du riz, la tradition de la culture dans les vergers de basse-cour a continué.

C’est là que MUDECI développe, depuis mai 2022, un centre de formation en agriculture urbaine dans le but d’apprendre aux populations locales à cultiver des jardins potagers pour l’autoconsommation.

Les jardins urbains de basse-cour étaient considérés comme une opportunité de réduire l’insécurité alimentaire dans laquelle se trouvaient de nombreuses personnes, en particulier celles qui ont perdu leurs moyens de subsistance pendant la pandémie de COVID-19. Ces personnes peuvent ainsi avoir accès à des aliments biologiques et également vendre ou partager le surplus de leur production avec leurs voisins.

L’aménagement et l’entretien des jardins urbains répondent à plusieurs besoins contemporains, tels que le renforcement des communautés, l’amélioration du paysage, l’habitabilité urbaine, le loisir, l’éducation environnementale, l’utilisation de l’eau de pluie et l’appropriation de l’espace public.

Cela vient également de la compréhension que le droit à la terre est essentiel à la préservation des différents systèmes alimentaires locaux, où la consommation est moins marchandisée et où les connaissances et pratiques alimentaires traditionnelles sont valorisées.

Ce projet est le résultat de l’échange d’expériences entre des femmes de base du Mexique et du Nicaragua et aussi de Toluca, Tejupilco, de l’État de Mexico et de Jojutla.

Le pouvoir transformateur des jardins urbains

« Notre initiative a contribué à renforcer l’agriculture urbaine comme alternative viable pour la production alimentaire dans de petits espaces », déclare Elsa María Arroyo Hernández, coordinatrice générale de MUDECI.

MUDECI a eu un impact positif sur la communauté grâce à ses différentes initiatives, telles que le projet de jardins potagers, une cuisine communautaire, le Jardin École Paulo Freire et la commercialisation de produits locaux.

Selon l’organisation, ces initiatives ont contribué à améliorer la sécurité alimentaire, à renforcer l’autonomie des femmes, à renforcer l’économie locale et à promouvoir l’agriculture urbaine et l’agroécologie. Les femmes ont assumé des rôles de leadership dans la planification et la mise en œuvre d’initiatives de résilience climatique.

Les communautés ont diversifié leurs cultures pour réduire leur dépendance à l’égard des cultures sensibles au climat. Des pratiques agroécologiques telles que le captage des eaux de pluie, l’utilisation d’engrais organiques et la plantation de cultures de couverture ont été mises en œuvre pour améliorer la santé des sols et leur résistance au climat. Enfin, des systèmes d’irrigation efficaces ont été développés pour optimiser l’utilisation de l’eau et réduire la vulnérabilité à la sécheresse, comme dans leur jardin hydroponique et leur toit vert.

Hernández souligne que la participation des femmes de base dans la planification, l’exécution et l’évaluation des projets a été très importante, car elles ont contribué avec des connaissances ancestrales héritées de génération en génération.

« Ceci a été une communauté agricole et il y a beaucoup de connaissances sur la terre, qui ont été enrichies par la contribution d’une ingénieure agronome qui nous a soutenu. La joie avec laquelle se déroulent les activités de préparation de la terre, de plantation et principalement de distribution de la récolte est également importante. De cette façon, le travail communautaire est renforcé pour le bien commun », ajoute-t-elle.

Quelques-uns des résultats obtenus jusqu’à présent :

• 100 garçons et filles, 120 femmes et 12 hommes ont été formés aux pratiques agroécologiques, à l’élevage de lapins et de poulets fermiers.

• Le projet a été sélectionné par le International Institute for Environment and Development (IIED) comme étude de cas.

• Elles ont doublé leur objectif de servir 1 500 repas dans leur cuisine communautaire.

Comme partenaires de cette pratique, MUDECI compte sur le Centro de Investigaciones Económicas, Sociales y Tecnológicas en Agronegocios y Agricultura Mundial (CIESTAAM) (CIESTAAM) de l’Université Autonome de Chapingo et sur la Central Campesina Cardenista et le Réseau des femmes agricultrices, productrices et artisanes du Mexique.

Les meilleures pratiques de résilience d’Azul (Maroc)

« L’application pour cartographier des cas de spoliation » est une pratique développée par Meriem Bentarjem et la Dr Soraya El Kahlaoui, co-fondatrice de la plateforme projet Traab, en partenariat avec l’organisation Azul (Maroc), l’une des membres de la Plateforme Féministe pour la Terre (FLP).

Azul œuvre pour redonner aux Amazighs (peuples autochtones du Maroc et d’Afrique du Nord) leur statut de citoyens à part entière, par opposition à leur manque actuel de pouvoir de décision et de souveraineté sur leur patrimoine matériel et immatériel.

Sa mission est de sensibiliser et mobiliser la population pour mieux faire face aux problèmes liés à la terre, aux ressources naturelles, aux inégalités socio-économiques, à la destruction des écosystèmes et à leurs conséquences sur les individus et les communautés.

Nous à la FLP avons cartographié les meilleures pratiques de résilience de nos membres afin que d’autres communautés et organisations puissent apprendre et adapter des outils et des stratégies à leurs réalités locales. Dans cet article nous parlerons d’une des pratiques inspirantes développées au Maroc par Azul.

Ceci fait partie d’une série d’articles détaillant les bonnes pratiques de chaque organisation FLP. Consultez notre blog pour lire les autres !

Application pour cartographier des cas de spoliation

Cette pratique a débuté en avril 2022 et se développe sur tout le territoire marocain et dans certaines régions de Tunisie où les problèmes de spoliation et d’expropriations sont constatés.

Elle bénéficiera aux peuples amazighs/autochtones à travers le Maroc et à toutes les communautés victimes d’expropriation foncière. Les femmes rurales, appelées Soulaliyates, représentent une part considérable des titulaires de droits sur les terres collectives.

La région du Maroc et de l’Afrique du Nord a été en grande partie colonisée par la France, qui a mis en œuvre des lois que les États continuent d’appliquer pour déposséder les peuples autochtones de leurs terres, territoires et ressources naturelles.

Depuis des siècles, les Amazighs ont développé plusieurs pratiques essentiellement liées à la terre (agriculture), aux territoires (élevage et transhumance) et aux ressources naturelles. Ses activités dépendent fondamentalement des spécificités et de la disponibilité des ressources et d’un souci sur l’adaptation et la protection des écosystèmes et la biodiversité.

L’emplacement spatial des Amazighs conditionne leur mode de vie et leur culture et leur confère leur identité ancestrale. Déposséder les Amazighs de leurs terres revient à les arracher à leur territoire et à les contraindre à migrer ailleurs, et confisquer leurs droits sur leurs ressources les maintient dans une précarité sans possibilité de développement. Cela les met dans des conditions vulnérables et les rend facilement assimilables.

Les communautés autochtones des zones rurales sont particulièrement ciblées par la privatisation des terres et de leurs ressources. De même, les communautés urbaines marginalisées vivant dans des bidonvilles et des zones périurbaines sont également soumises à des procédures d’expulsion.

« La prolifération des actes frauduleux et des activités illégales est telle qu’il existe ce qu’on appelle une « mafia foncière » qui sévit dans toutes les régions du Maroc visant à monopoliser les terres au détriment de ses propriétaires légitimes. Ce pillage trouve un terrain fertile dans la législation, l’impunité, les jeux de pouvoir, la fragilité des communautés, l’inefficacité des tribunaux, la connivence des magistrats et la politique agricole, qui font que le droit et la justice n’ont plus leur place, notamment en matière de terres, soit pour les communautés, soit pour les femmes, dernier maillon d’une chaîne fragilisée », explique Amina Amharech, membre fondatrice d’Azul.

Selon elle, la principale difficulté réside aujourd’hui dans l’absence d’une base de données qui pourrait recenser tous les cas de dépossessions pour établir une cartographie exhaustive de l’ampleur du problème – c’est pourquoi cet projet a été créé.

Comment fonctionne le projet

Ce projet a pour objectif de collecter des informations sur les conflits fonciers pour identifier les communautés touchées, dresser une cartographie complète du problème et faire entendre la voix des communautés dépossédées.

A travers la pratique de la « contre-cartographie », elle vise à cartographier les conflits fonciers en Afrique du Nord, et principalement au Maroc et en Tunisie, en créant une plateforme web open source combinant cartographie interactive et narration. Le projet s’appuie également sur le développement d’une application pour proposer un outil de collecte de données open source.

Il comporte deux volets :

• La cartographie des conflits fonciers : Il est prévu qu’environ 50 communautés bénéficieront d’une visibilité de leurs revendications via la plateforme web.

• L’application : Les membres du réseau communautaire Amazigh Azul seront formés à l’utilisation de l’application pour collecter des données sur les conflits fonciers.

Il convient de noter qu’une attention particulière sera portée à la question des femmes, qui constituent le groupe social le plus impacté dans tout processus de discrimination et de marginalisation, et notamment en termes d’accès à la propriété et à la terre.

Les femmes reçoivent rarement une indemnisation en cas de transfert de terrain, se retrouvent souvent sans offre de relogement, et sont exclues des négociations. Le projet veillera à ce que la question de l’équité entre les sexes soit représentée dans la cartographie des conflits fonciers et se concentrera sur l’approche du genre pour construire des alternatives.

Grâce à l’application, à une base de données fiable et à une cartographie précise, les voix des femmes seront plus audibles et l’impact du déni de leurs droits sera plus visible. Il s’agit d’une étape essentielle pour changer les lois et soutenir efficacement les revendications des femmes à différents niveaux, bénéficiant ainsi également à l’ensemble du réseau FLP.

Il est aussi important de noter que les résultats de ce projet renforceront une autre bonne pratique d’Azul, à savoir le plaidoyer au niveau international pour la reconnaissance des droits des Amazighs en tant que peuple autochtone, mais aussi pour pouvoir appeler à une refonte des lois foncières.

L’opportunité de développer une deuxième phase de ce projet permettra à Azul de capaciter les communautés à l’utilisation de l’application de collecte de données. A cet effet, des ateliers de formation seront organisés avec différentes communautés. Une attention particulière sera accordée à la formation des femmes enquêtrices.

Dans ce projet, Azul collabore avec la Dr Soraya El Kahlaoui (boursière Marie Skłodowska-Curie), chercheuse principale du projet Traab, et ses partenaires du projet, dont l’Université de Gand.

Pour mieux comprendre les problèmes rencontrés par le peuple amazigh, lisez cet article d’Amina Amharech sur le site web d’IWGIA (en anglais).

Les meilleures pratiques de résilience de l’Espaço Feminista (Brésil)

« La régularisation foncière comme garantie des droits fonciers des femmes » est l’une des meilleures pratiques de résilience développées par l’organisation Espaço Feminista do Nordeste para a Democracia e Direitos Humanos (Brésil), l’un des membres de la Plateforme Féministe pour la Terre (FLP).

Fondée en 2008, Espaço Feminista travaille dans des domaines tels que :

  • Production de connaissances sur la situation des femmes, en réalisant diverses études, recherches et publications.
  • Processus de formation visant à valoriser les femmes en tant que sujets autonomes (citoyennes) et à encourager leur participation à la formulation et au suivi des politiques publiques.
  • Articulation et plaidoyer nationaux et internationaux.

FLP a récemment cartographié certaines des meilleures pratiques de résilience de nos membres afin que d’autres communautés et organisations puissent apprendre et adapter des outils et des stratégies à leurs réalités locales. Dans cet article, nous parlerons d’une des pratiques inspirantes développées au Brésil par Espaço Feminista (EF).

Ceci fait partie d’une série d’articles détaillant les meilleures pratiques de chaque organisation qui compose la FLP. Consultez notre blog pour lire les autres !

La régularisation foncière comme garantie des droits fonciers des femmes

Cette pratique est actuellement développée dans la municipalité de Bonito, dans l’État de Pernambuco (Brésil), dans 15 quartiers informels créés par le gouvernement municipal mais jamais régularisés.

À travers ce travail, Espaço Feminista vise à lutter contre l’inégalité des droits à la terre et au logement pour les femmes, les familles à faible revenu et les mères célibataires (ou les familles de femmes seules). C’est pourquoi ils examinent les droits à la terre et au logement du point de vue des droits fonciers des femmes.

« Nous abordons et analysons toutes les conséquences perverses provoquées par le manque de droits à la terre et au logement en termes d’insécurité et de violence dans la vie et les moyens de subsistance des femmes », explique Patrícia Chaves, directrice exécutive d’Espaço Feminista.

EF travaille en partenariat avec le gouvernement municipal de Bonito, dans le but d’assurer la sécurité foncière d’environ 5 000 familles dans les 15 quartiers informels. Le travail comprend un cadastre socio-économique de toutes les familles vivant dans les quartiers informels, une étude topographique avec l’identification de chaque propriété, une enquête sur les infrastructures des quartiers et des entretiens individuels pour la collecte de données et de documents.

Espaço Feminista aide l’équipe technique du programme « Minha Casa é Legal » de la Mairie de Bonito sur les aspects juridiques, notamment sur les manières de garantir que la priorité soit donnée aux femmes. De plus, il rédige un projet qui est ensuite envoyé au bureau d’état civil. L’action dispose également d’une équipe locale qui développe des ateliers de sensibilisation avec les résidents, répond aux questions et les guide pour garantir la préférence au moment du titrage.

Jusqu’à présent, 4 des 15 zones ont été complétées et les enquêtes sont en cours dans 5 zones.

Cette pratique s’avère efficace pour assurer l’autonomie, la sécurité foncière et le logement des femmes et de leurs familles, en particulier celles qui souffrent d’une plus grande vulnérabilité parce qu’elles ont une connaissance très limitée de leurs droits ou sont en relations informelles avec leurs partenaires. Beaucoup sont des secondes épouses et sont vulnérables au marché informel de la vente de lots.

L’action promeut également l’autonomie des femmes à plusieurs niveaux, tels que l’autonomie dans la décision sur leur résidence, la garantie de la sécurité pour les prochaines générations et la possibilité de générer une autonomie financière avec la sécurité de la terre en leur nom.

« Ce document est une bénédiction. Je pensais que ma maison n’aurait jamais de document. Et aujourd’hui, je l’ai entre les mains, Dieu merci ! », a déclaré la bénéficiaire Maria Madalena da Silva dans la vidéo ci-dessous, réalisée par Espaço Feminista :

« Notre travail est un moyen de surmonter l’injustice à laquelle les femmes sont confrontées en raison de l’informalité et de ses conséquences, telles que les transactions informelles à leur insu ou sans leur consentement, ainsi que les problèmes de violence patrimoniale ancrés dans notre culture patriarcale et très présents dans la vie des femmes à faible revenu, vivant dans une totale informalité », ajoute Patrícia Chaves.

Quelques-uns des résultats obtenus jusqu’à présent :

  • Le 11 mars 2021, la première zone comprenant 479 propriétés (terrain et maison) a été enregistrée et des certificats ont été remis aux résidents, dont 69% au nom de femmes, en titres individuels ou conjoints.
  • Le 11 mars 2022, le deuxième zone a été délivré, bénéficiant cette fois à 150 familles, dont 50 % sont allés aux femmes sous forme d’enregistrement individuel et 35 % étaient des titres conjoints – femme et homme – mais parmi celles-ci, 69 % portaient le nom de la femme comme première titulaire.
  • La troisième zone, appelée Frei Damião, a été conclue en novembre 2022, bénéficiant directement à 741 familles. Plus de 70 % des titres fonciers avaient pour bénéficiaires les femmes. Dans cette zone, le nombre de mères célibataires était très élevé et EF développe une analyse des résultats et crée les conditions nécessaires pour réaliser une évaluation d’impact.
  • La quatrième zone, Ben-ti-vi, a été conclue. Des parcelles de terrain seront distribuées à 280 familles, dont la plupart sont des femmes.
  • La pratique est structurée, très bien documentée et diffusée et offre une série de possibilités d’évaluation future sur l’impact direct sur la vie des femmes et de leurs familles, en particulier les femmes soignantes qui, dans de nombreux cas, s’occupent de leurs petits-enfants pour permettre à leurs filles de travailler.

Pour plus d’informations sur cette pratique, regardez la vidéo sur la chaîne YouTube de Cadasta:

Comme partenaires dans cette pratique, Espaço Feminista compte sur le Gouvernement Municipal de Bonito ; Procureur général de la municipalité de Bonito ; Bureau d’enregistrement immobilier de Bonito ; et le Tribunal de Justice de l’État de Pernambuco. Le travail est soutenu par le WellSpring Philanthropic Fund, Landesa et la Fondation Cadasta.

Vous aimerez peut-être aussi lire le texte (en anglais) Transforming our cities by addressing gender deficit in land titles in Brazil, publié par Patrícia Chaves sur Urbanet.

La FLP promeut une réunion régionale en Amérique latine aux côtés de la Marcha das Margaridas, au Brésil

La différence de langues et d’origines géographiques n’est pas un obstacle à la création de liens d’affection et de lutte. La preuve en est l’expérience partagée par les femmes de la Plateforme Féministe pour la Terre (FLP) lors de la rencontre régionale tenue à Brasilia, capitale du Brésil, entre le 13 et le 16 août.

Au cours de trois moments très spéciaux, ces femmes diverses se sont réunies pour se renforcer mutuellement, ainsi que leurs organisations et la Plateforme.

Les deux premiers jours s’est tenue la réunion régionale des organisations FLP d’Amérique Latine : Espaço Feminista (Brésil), Luna Creciente (Équateur), Fundación Plurales (Argentine) et MUDECI (Mexique), réunissant 15 femmes des quatre pays. Dans le troisième jour, elles ont rejoint 25 autres femmes de l’État de Pernambuco, au nord-est du Brésil, qui représentent les différents territoires, communautés et identités qui composent Espaço Feminista.

Tous ces processus ont culminé le dernier jour de l’événement, avec la participation à la Marcha das Margaridas (Marche des Marguerites). L’une des plus grandes mobilisations féministes d’Amérique latine, la marche a lieu tous les quatre ans et rassemble plus de 100 000 femmes à Brasilia.

Rencontre régionale de la Plateforme Féministe pour la Terre

Lors de la rencontre régionale, promue par le FLP grâce au soutien de la Fondation Ford, les organisations membres de la Plateforme en Amérique Latine étaient représentées non seulement par leurs dirigeantes, mais aussi par d’autres femmes qui composent les organisations et sont leaders sur leurs territoires.

« Cette rencontre était très importante pour nous. Nous avons pu discuter des actions menées jusqu’à présent et planifier ce qui est le plus pertinent pour les organisations et la Plateforme dans les années à venir. Cela se fait à travers un processus d’écoute et de discussion collective, basé sur les expériences et les besoins de chaque organisation », a déclaré Patrícia Chaves, d’Espaço Feminista.

Au cours de la réunion de deux jours, des sujets tels que le plaidoyer politique qualifié, la formation politique féministe, la mobilisation des ressources, la démocratisation de l’accès à l’information et à la production de connaissances, la communication par des moyens contre-hégémoniques et la défense de la nature ont été débattus, avec une nette opposition à l’extractivisme et une appréciation de la sagesse des peuples traditionnels.

« Nous avons réfléchi sur la systématisation du travail et de l’expérience des femmes leaders communautaires et sur l’importance de sauver nos pratiques de travail et de les partager avec les femmes de notre réseau mondial », a souligné Elsa Maria Arroyo, de MUDECI.

En petits groupes puis ensemble, elles ont partagé les principales stratégies adoptées par leurs organisations et les besoins qu’elles ressentent pour aller plus loin dans leurs missions. Sur cette base, les participantes ont défini des stratégies pour accroître l’impact de la Plateforme, atteignant ainsi des espaces de plus en plus larges en fonction de leurs connaissances, de leurs voix et de leurs perspectives.

Verónica Luna, de la Fundación Plurales, considère que la participation à des espaces d’échange, d’apprentissage et de décision collective comme celui-ci a des répercussions sur les actions quotidiennes des organisations : « Avec ça, chaque personne et chaque organisation se développe encore plus dans l’exercice de la citoyenneté, tout comme la démocratie, qui semble aujourd’hui si fragile et dont il faut prendre soin. »

Rencontre avec des femmes de Pernambuco

Dans un deuxième moment, 25 agricultrices, pêcheures et quilombolas venant de différentes parties de l’État de Pernambuco ont rejoint les femmes déjà présentes à Brasilia. Elles ont vécu un espace d’échanges passionnant qui a contribué à donner une dimension plus large à leurs luttes, renforçant la perspective selon laquelle les problèmes qu’elles rencontrent sur leurs territoires sont structurels et communs à tous les pays du Sud.

« C’était un moment très important non seulement pour la Plateforme, mais aussi pour les femmes d’Espaço Feminista, car cela a créé un lien entre elles. Une agricultrice de Pernambuco présente à la réunion a résumé cette expérience : elle a dit qu’elle ne voyait que la réalité de la municipalité de Bonito, où elle vit, et lors de ce voyage, elle a réalisé qu’elle n’est pas seule et que sa lutte est la même que celle de milliers de femmes, que ce soit en Argentine, au Mexique, en Équateur… », a souligné Patrícia Chaves.

De même, les compagnes d’autres pays étaient heureuses de l’opportunité de connaître la lutte des femmes de Pernambuco, comme le rapporte Elsa Maria Arroyo : « Ce sont des femmes inspirantes, comme celles qui font partie des quilombos, qui se battent pour obtenir des titres de propriété des terres et sont un symbole historique de résistance héroïque contre l’esclavage et l’oppression. »

Marcher ensemble dans la Marcha das Margaridas

Enfin, les deux groupes unis se sont joints aux plus de 100 000 femmes de la campagne, des forêts, des eaux et des villes qui ont pris les rues de Brasilia le 16 août pour manifester pour le droit à la terre et aux territoires, pour la fin de la violence contre les femmes, et pour santé et éducation.

L’une des plus grandes actions de femmes d’Amérique Latine, la Marcha das Margaridas (Marche des Marguerites) rend hommage à Margarida Alves, une dirigeante syndicale cruellement assassinée il y a 40 ans pour avoir défendu les droits des travailleurs ruraux. Dans sa 7ème édition, la manifestation avait pour devise « Pour la reconstruction du Brésil et pour le bien-vivre ».

Les femmes des autres pays latins ont marché aux côtés de celles de Pernambuco, renforçant ainsi leurs liens de solidarité. « Marcher ensemble avec des camarades de différents espaces, organisations et pays, mais avec le même idéal, a été un honneur et un privilège. Prendre l’espace public et faire entendre nos voix, des milliers de voix, est une pratique que nous devons valoriser », a ajouté Verónica Luna. « Cette expérience a apporté une perspective de résistance collective et d’appartenance. À ce moment-là, nous étions toutes sœurs”, a défini Patrícia Chaves.

« Avoir participé à cette mobilisation au sein de la délégation internationale et invitée par la Plateforme Féministe pour la Terre a été une expérience merveilleuse qui montre que Margarita Alves n’est pas morte, elle vit dans la mémoire du peuple brésilien. », a ajouté Elsa Maria Arroyo.

Yenny Nazareno, de Luna Creciente, a souligné que des femmes des cinq continents étaient présentes : « et nous avons toutes crié d’une seule voix, sans distinction de langue ou de race. Nous avons marché et dit que nous n’étions pas seuls et qu’ensemble, nous pouvons transformer le monde ».

Zita Suárez, de la même organisation, s’est montrée ravie de l’opportunité de participer à l’événement : « J’ai pu partager des énergies positives avec des milliers de femmes autonomes, nous fournissant des bonnes énergies pour continuer nos processus de combat ».

Après ces journées enrichissantes, les femmes de la Plateforme Féministe pour la Terre continuent leurs combats, désormais encore plus renforcés, en luttant pour le Bien Vivre et en expérimentant jour après jour ce qu’elles chantaient ensemble dans les rues de Brasilia : « Nous continuerons à marcher, attentives et fortes, nous continuerons ensemble ».

Tin Hinan participe au 1er Festival des Féministes au Burkina Faso

Depuis 2015, le Burkina Faso est confronté à la violence de groupes terroristes. Entre autres problèmes graves, cela provoque de nombreux déplacements internes. Les enfants et les femmes sont les populations les plus touchées et, entre autres violations des droits, subissent des violences sexistes et sexuelles.

La résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité des Nations unies souligne l’importance de répondre aux besoins des femmes et des filles victimes de violence, d’assurer la participation des femmes aux processus décisionnels, en particulier dans les zones à risque ou touchées par des conflits, en plus d’autonomiser les femmes et les filles et promouvoir l’égalité des sexes pour parvenir à une paix durable. Cependant, cela ne se produit pas dans la pratique au Burkina Faso.

Pour cette raison, l’Initiative Pananetugri pour le Bien-être de la Femme (IPBF), en collaboration avec le Collectif des Féministes du Burkina Faso, a organisé en mars de cette année la 1ère édition du Festival des Féministes, autour du thème « Féminisme, Paix et Sécurité ». Des femmes leaders d’associations et des chercheures ont été invitées à dire un mot par rapport à la situation sécuritaire dans laquelle se trouve le pays.

Parmi elles était Saoudata Aboubacrine, de l’association Tin Hinan, membre de la Plateforme Féministe pour la Terre. Saoudata a partagé ses expériences avec ses pairs et a appelé les décideurs, aussi bien au niveau national qu’international, d’appliquer les textes qu’ils adoptent en mettant en œuvre leurs engagements.

Elle s’est également adressée aux filles et aux femmes, en leur exhortant de continuer à renforcer des moments de partage d’expériences, d’échanges intergénérationnels et de discussions comme celui-ci. « (…) Tant que les femmes n’auront pas une voix, rien ne pourra changer, et pour avoir une voix, il faut des mouvements qui sont actifs, pas de mouvements de nom seulement », a-t-elle dit.

La participation de Saoudata à cet important événement a fait l’objet d’un article publié sur le site Féminin Actu. Lisez le texte complet ici.